Quatrième de couverture:
"Elle ressemblait ainsi à une très jeune princesse de conte, aux lèvres
bleuies et aux paupières blanches. Ses cheveux se mêlaient aux herbes
roussies par les matins de gel et ses petites mains s’étaient fermées
sur du vide. Il faisait si froid ce jour-là que les moustaches de tous
se couvraient de neige à mesure qu’ils soufflaient l’air comme des
taureaux. On battait la semelle pour faire revenir le sang dans les
pieds. Dans le ciel, des oies balourdes traçaient des cercles. Elles
semblaient avoir perdu leur route. Le soleil se tassait dans son manteau
de brouillard qui peinait à s’effilocher. On n’entendait rien. Même les
canons semblaient avoir gelé.
« C’est peut-être enfin la paix… hasarda Grosspeil.
– La paix mon os !» lui lança son collègue qui rabattit la laine trempée sur le corps de la fillette."
« C’est peut-être enfin la paix… hasarda Grosspeil.
– La paix mon os !» lui lança son collègue qui rabattit la laine trempée sur le corps de la fillette."
Les Âmes grises (Prix Renaudot 2003, consacré meilleur livre de l'année en 2003 par le magazine Lire, Grand Prix des lectrices de Elle catégorie roman) a été traduit dans vingt-cinq pays.
Mes impressions:
Une couverture dans les tons de
bruns, un peu sépia. Une petite fille, des branchages ou plutôt des
broussailles. Les Âmes grises, on sent que la gaité ne sera pas de mise.
On entre à peine dans l’histoire
et déjà, elle nous happe. Qui est le narrateur ? Comment sait-il ? Où
se situe-t-il au milieu de tous ces événements et de ces différents
personnages ?
Très vite, vient l’Affaire, la
majuscule est d’importance, le terrible assassinat de cette petite fille, la
bien nommée Belle de jour, d’autres meurtres suivront. Un suspect se dessine
rapidement et parallèlement, notre envie de savoir et d’enfin comprendre nous
emporte.
L’opposition entre les petites
gens et les notables tout-puissants, le pot de terre contre le pot de fer,
donne toute sa force et contribue à donner corps à cette histoire qui fleure
bon la province française de cette époque troublée par la première guerre.
Plus encore que pour l’histoire,
particulièrement poignante, j’ai eu un véritable coup de cœur pour l’écriture
de Philippe Claudel que j’ai découvert avec ce livre. Une écriture parfaitement
calibrée, toute en nuances, en évocations, en émotions et en parfums, déjà, qui
amplifie la véracité et l’authenticité du récit.
Un grand merci à Anne pour cette belle découverte.
Philippe Claudel
Extraits:
"On sait toujours ce que les autres sont pour nous, mais on ne sait jamais ce que nous sommes pour les autres."
"C'est douloureux d'écrire. Je m'en rends compte depuis des mois que je m'y suis mis. Ça fait mal à la main, et à l'âme."
"On doit leur apprendre ça dans les séminaires: frapper les imaginations avec quelques phrases bien tournées."
"C'était sa façon, au juge, de réduire à rien celui à qui il parlait. Il ne disait pas tu, ni vous, il disait il ou elle, comme si l'autre n'était pas là, comme s'il n'existait pas, comme si rien ne laissait supposer sa présence. il le rayait grâce à un pronom."
Le Livre de Poche N°30515
ISBN 978 2 253 10908 2
280 pages
(Offert pour mon anniversaire par une belle nantaise)
Pas facile d'offrir un livre, mais là la personne a bien choisi. Merci pour le partage.
RépondreSupprimerBonne semaine, FLaure
Excellent choix oui.
SupprimerBonne semaine à toi aussi FLaure.
Un très joli moment de lecture...et ce sublime passage...
RépondreSupprimer" Hier, je suis allé traîner vers le pont des Voleurs.
Tu te souviens?
Quel âge avions nous?
Un peu moins de 20 ans?
Tu portais une robe couleur de groseilles.
J'avais le ventre serré.
Nous étions sur le pont et nous regardions la rivière.
Ce courant, tu me disais, c'est notre vie qui passe, regarde comme elle va loin, regarde comme elle est belle, là, entre les fleurs de nénuphar, les algues aux cheveux longs, les berges de terre glaise. Je n'osais pas te prendre par la taille.
J'avais dans mes tripes un noeud si violemment serré que je respirais à peine.
Tes yeux regardaient le lointain.
Les miens regardaient ta nuque.
Je sentais ton parfum d'héliotrope et celui de la rivière, tout de frais et d'herbes mâchées.
Puis, sans que je m'y attende, tu t'es tournée vers moi, m'a souri, et tu m'as embrassé.
C'était la première fois.
L'eau courait sous le pont.
Le monde avait l'éclat des beaux dimanches.
Le temps s'est arrêté."
Bonne soirée
Merci pour ce magnifique partage.
SupprimerBonne soirée à toi aussi.
Au fait,
RépondreSupprimerJoyeux anniversaire !
Je sais pas quand c'est, après tout peu importe, je crois que ça n'a pas vraiment d'importance et d’intérêt, ICI.
Après cette politesse d'usage, et après avoir lu tes impressions, ça me donne bien envie de le découvrir...
Laisse-toi tenter, tu ne le regretteras pas.
SupprimerJe dois dire que la rencontre ne s'était pas faite pour moi.
RépondreSupprimerPersonnellement, je l'ai de beaucoup préféré à Parfums mais j'en lirai d'autres de lui pour me faire une idée encore plus précise.
SupprimerBelles fêtes à toi et à ceux qui t'entourent. Peut-être beaucoup de bonnes lectures dans la hotte du "père noël".
RépondreSupprimerA bientôt, FLaure
Bonnes à toi aussi FLaure et à bientôt.
SupprimerClaudel,un univers particulier.... lorsque l'on y a goûté, difficile de s'en passer !!!
RépondreSupprimerJ’aime tellement cet auteur! La petite fille de Monsieur Linh, j’en ai laissé des larmes. Le Rapport de Brodeck, tellement bon aussi. Les âmes grises est le prochain que je me promets de lire de l’auteur. Tu me donnes tellement envie de le lire maintenant, mais comme tu dis, c’est pas joyeux joyeux, j’attendrai peut-être les longs mois d’hiver! (mdr) J’aime trop cette phrase qui lui rend si bien justice « j’ai eu un véritable coup de cœur pour l’écriture… toute en nuances, en évocations, en émotions et en parfums ». Tellement beau ce que tu dis là, « tout en parfum »…
RépondreSupprimerJe ne peux que te le recommander celui-ci, j'ai tout simplement adoré !
RépondreSupprimerLes deux dont tu parles sont dans ma PAL, cool ! Merci du conseil ! :)