mardi 25 février 2014

Ce qui n'est pas écrit - Rafael Reig




Carlos est divorcé de Carmen avec laquelle il a eu un fils, Jorge, dont il a été trop longtemps séparé. Carlos trouve que Jorge est un peu trop dans les jupes de sa mère. Il décide donc de l’emmener passer un weekend en montagne avec lui, histoire de le dégourdir un peu et surtout de mieux le connaitre. En partant, il laisse discrètement le manuscrit de son dernier roman chez son ex-femme, juste pour qu’elle le lise, selon le mot qu’il lui laisse. 

« Il a laissé son roman à Carmen et elle lui a laissé son fils. Carlos se demande ce que ça signifie. Est-ce que par hasard l'enfant serait un roman qu'il doit lire et apprendre à interpréter ? A-t-il un sens qui n'est pas visible ? Carmen a-t-elle écrit l'enfant comme ça seulement pour qu'il le lise et comprenne quelque chose, pour qu'il reçoive le message ? Alors, à qui appartient cette peur : à Carmen ou à son fils ? » 

Dès les premières pages, Carmen croit se reconnaitre dans un des personnages de ce roman particulièrement noir. Plus, elle avance dans sa lecture, plus le trouble l’envahit. Et si Carlos avait voulu lui dire quelque chose par le biais de son livre ? Et s’il y avait un message à découvrir entre les lignes de ce roman ? Et s’il y avait un sens caché à tout ça ? Et si le plus important se trouvait dans Ce qui n’est pas écrit ? 

« On dit souvent que le romancier manipule le lecteur, mais elle, comme lectrice, n'était-elle pas en train de manipuler le roman dans le sens où elle avait décidé de le lire ? Lire dans la direction contraire à ce qui est écrit n'était-ce pas un autre acte de violence, un exercice de pouvoir ? » 

D’emblée, on se dit qu’il va y avoir un problème, que tout ne va pas se passer comme prévu. On pense aussi à Sukkwan Island, ce père et ce fils qui partent ensemble dans un endroit isolé. Mais ici, même si l’envie de savoir est forte, l’intérêt est ailleurs. Fiction et réalité entremêlés et parfois réalité rattrapée par la fiction.

La structure du roman est triple. Le récit de la confrontation du père et du fils d’une part, celui de la mère angoissée d’autre part, et enfin le roman dans le roman. Celui de Carlos qui prend vie par la lecture de Carmen. Sans lecteur, pas d’existence pour le roman. Ne dit-on pas parfois qu’un roman est différent pour chacun de ses lecteurs ? Rafael Reig nous livre une intéressante réflexion sur le processus de création littéraire, sur ce qu’on lit, ce qu’on lit entre les lignes et ce que chacun met derrière les mots. 

« Celui qui écrit a le pouvoir, celui qui lit se soumet. » 

Ce qui n’est pas écrit est un roman noir aussi étonnant qu’oppressant dont la construction et la réflexion qu’il suscite font la force, l’intérêt et l’originalité.


Merci à Babelio et aux Éditions Métaillié pour cette belle découverte. 


ISBN 978 2 86424 943 6
239 pages
2014

L'avis de Sandrine

            & l'avis du Bison

samedi 22 février 2014

Jacques Tati, le funambule du cinéma - Delphine Bertozzi & Demetra Nikolopoulou




Je dois à Jacques Tati un de mes plus anciens souvenirs de cinéma. De cinéma à la télévision bien sûr. Et sans savoir que c’était du Tati à l’époque. J’étais tout gamin et très souvent seul chez moi, insomniaque, avec les livres et la télévision pour seuls compagnons nocturnes. La Dernière séance, le Ciné-Club et le Cinéma de Minuit étaient mes amis.

Longtemps, je cherchais en vain quel pouvait être ce film que j’avais adoré et dont j’ignorais le titre. On y voyait un grand bonhomme maladroit fumant la pipe, portant chapeau et vieil imperméable élimé. Il rendait visite à des gens de sa famille, plutôt snob, habitant une maison à la pointe de la modernité pour l’époque. Des années plus tard, peut-être dix ou quinze ans, je ne sais plus, je découvrais ébahi que je m’étais enthousiasmé pour Mon Oncle de Jacques Tati. 


« Dans les années cinquante, il n’y a pas de chômage, tout le monde a du travail. Une bonne raison de ne pas se faire de souci et de penser aux choses agréables : les vacances et l’aménagement tout confort de sa maison. Deux thèmes dont il va faire le sujet de ses films suivants : Les Vacances de M. Hulot, Mon Oncle. » 

Tati a dix-sept ans à peine lorsqu’il donne ses premières représentations de mime. C’est dans le music-hall qu’il s’exprime ensuite Ce n’est donc pas un hasard si son cinéma est extrêmement visuel. A la manière du Charlot de Chaplin, son personnage de Monsieur Hulot est devenu mythique. Il plait aux enfants par son côté burlesque et aux parents par un côté bien plus profond qu’il n’y paraît, son innocence relative.
Tati est réputé pour apporter un soin quasi obsessionnel aux bruitages de ses films. Films qui en dépit de leur absence de dialogues sont néanmoins très expressifs. 

« Tati ne ménage ni son temps, ni ses troupes car il est très pointilleux. Sur les tournages, on le surnomme « monsieur Tatillon ». » 

Le cinéma de Jacques Tati ce sont des ambiances, des gags, des sons, une musique inoubliable, une autre époque, une silhouette, des souvenirs… 

Jour de fête, Les Vacances de M. Hulot, Mon Oncle, Playtime, des films à redécouvrir et à faire découvrir aux enfants, petits et grands pour des moments de rire et de plaisir garantis.



Mon Oncle : un film...
...deux univers !


ISBN 978 2 919372 102
46 pages
2012

mercredi 19 février 2014

Holmes (1854 / 1891 ?) L Adieu à Baker Street - Cecil & Brunschwig




J’ai tout aimé dans cette bande dessinée !

Déjà avant de l’ouvrir, il se dégage une forme de noblesse, d’élégance dans son format en parfaite adéquation avec l’univers holmésien tel que je me l’imagine. Ensuite, ce dessin de couverture en noir et blanc qui suggère plus qu’il ne montre. Enfin ce titre, direct, concis en lettres rouges, Holmes (1854 / 1891 ?) et ce sous-titre, L’Adieu à Baker Street. 

Tout est parfait dans ce premier tome ! Cécil a fait un boulot formidable. Le graphisme de l’ensemble, les visages des personnages, leurs costumes, les décors, l’époque très bien retranscrite, tout comme l’ambiance des romans de Conan Doyle. Un noir et blanc extrêmement soigné contribue à notre sensation de baigner dans l’époque des protagonistes.

Une réussite totale, on est immédiatement et irrémédiablement happé par l’intrigue de Brunschwig, bien construite, prenante et pleine de suspens. Pour preuve, une fois terminée, je suis aussitôt allée me procurer les deux autres tomes que j’ai aussitôt dévorés d’une traite.

Tout commence après la tragique disparition de Sherlock Holmes, dans les fameuses chutes du Reichenbach, dont ce cher Watson tente de faire le récit. Alors que le logement que Sherlock Holmes occupait chez sa logeuse Madame Hudson a été saccagé, Watson, accompagné de Wiggins, part à la recherche d’individus qui semblent s’intéresser de très près aux dossiers du célèbre détective du 221b Baker Street… 

A suivre !




ISBN 978 2 7548 0048 8
39 pages
2088

lundi 17 février 2014

Simone Signoret - Maurice Périsset




Si vous aimez les films bien noirs et que le noir et blanc n’est pas rédhibitoire pour vous, je ne peux que vous encourager à découvrir Manèges, film d’Yves Allégret avec Simone Signoret, Bernard Blier et Jane Marken. Un film d’un cynisme et d’une noirceur totale. Signoret y excelle dans le sordide et la manipulation. Blier y est irritant de naïveté et démontre à quel point l’amour peut rendre aveugle. Quant à Jane Marken, moins connue mais non moins convaincante, elle est pour moi, dans ce film, la définition parfaite de la vulgarité. Des années après la première fois où j’ai vu ce film, sa voix et son rire raisonne encore en moi comme si c’était hier. 



Simone Signoret, ce sont comme ça des dizaines de films à voir et à revoir, que je garde en mémoire. Casque d’or, Les Diaboliques d’après Boileau et Narcejac,  Le Chat et La Veuve Couderc d’après Simenon, Les Granges Brulées et bien d’autres encore. Les Diaboliques pour son scénario non moins diabolique et une Signoret glaciale face un Paul Meurisse glaçant. Le Chat pour cet affrontement magistral avec Jean Gabin et cette haine qui a insidieusement séparé ce couple après toutes ces années. Chaque fois, je repense à mes grands-parents. Paix à leur âme. 



Simone Signoret, c’est aussi la première actrice française à recevoir un Oscar pour Les Chemin de la haute ville. Simone Signoret, c’est une grande histoire d’amour avec Yves Montand. Histoire avec une légère ombre appelée MarilynSimone Signoret, c’est une grande dame, une femme engagée, une comédienne à ne surtout pas oublier. 

Simone Signoret de Maurice Périsset, c’est un aperçu non exhaustif sur sa carrière et sa vie qui reste néanmoins une lecture tout à fait divertissante.


J'ai Lu Cinéma N°7
Les Grands Acteurs
ISBN 2 277 37007
143 pages

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