lundi 30 mars 2020

La Daronne - Hannelore Cayre



Patience Portefeux, la cinquantaine, veuve. Profession : interprète et traductrice pour le Ministère de la Justice. Une situation enviable à première vue, sauf que pas de bulletins de salaire et pas de retraite, le ministère paye au black !

L’avenir s’annonce compliqué. Surtout quand on a deux filles déjà grandes et une mère acariâtre placée dans un EHPAD qui coûte évidemment un bras.

Alors, à force de retranscrire des écoutes téléphoniques de dealers et de petits trafiquants pas toujours très futés, elle se dit qu’elle aussi pourrait bien, elle aussi, prendre sa part du gâteau…


Voilà un excellent polar social, politique, féministe, porté par un style direct, concis, vif, percutant et drôle mais surtout qui sonne juste.

C’est remarquable d’intelligence avec un regard fin et acéré sur des sujets de société actuels qui donne de belles pages sur la drogue, le racisme ou encore la vieillesse.

Le film devait sortir ces jours-ci avec Isabelle Huppert dans le rôle principal. J’ignore si Hannelore Cayre a pensé à elle en écrivant son livre mais tout au long de ma lecture, j’avais l’impression d’entendre la comédienne tant le personnage semble avoir été écrit pour elle.

La sortie du film est retardée alors en attendant lisez absolument ce livre, La Daronne, c’est de la bombe !

Grand prix de littérature policière 2017
Prix Le Point du polar européen 2017

ISBN 9782757882917
192 pages
2017/2020
6,60€




samedi 28 mars 2020

Le Juke-box du samedi - L'Indien [ Juliette Armanet ]



Je traversais le Far West, seul, sur mon cheval fougueux, depuis des jours, des mois, des années, sans d’autres buts que de chevaucher, à l’envi, vers l’infini. Sous une épaisse couche de poussière, on distinguait à peine ma barbe, mes bottes et ma capote. Depuis longtemps déjà, mon chapeau ne faisait qu’un avec ma tête et mes cheveux crasseux. Mes éperons muets sous la boue séchée ne tintaient plus jamais, seule ma monture semblait encore en vie.

Soudain, sous le soleil, je vis un fier cavalier qui fendait l’horizon. Face à moi si terne et si crotté, tout en lui luisait : son œil, sa peau, sa chevelure. Était-il sioux, comanche, apache ou bien cheyenne ? Je n’en savais foutre rien mais il a changé ma vie. Je me suis décrotté, dépoussiéré et je me mis à mon tour à briller quelque peu, autant que faire se peut. Lui, c’est l’indien, le seul être humain qui a réussi à me rendre ma fougue, à me dompter un peu… Lui, c’est l’indien et moi le cow-boy. Et depuis lors, nous chevauchons côte à côte, sans penser à demain.

"Flèche en opale dans mon ovale
Tout m'étale au visage pale
Drôle de fleur
Un indien dans mon cœur
C'est lui
Oui, c'est lui
Oui, c'est lui
Un indien pour la vie"

Juliette Armanet, L'Indien (2017)

lundi 23 mars 2020

Couleurs de l'incendie - Pierre Lemaitre & Christian De Metter

Madeleine Péricourt a épousé Gravelle. Mais dans la famille Péricourt, personne ne se fait d’illusions sur ce héros des tranchées reconverti dans les affaires douteuses. Quand celui-ci doit répondre de ses malversations, personne ne veut lever le petit doigt. Ce vieux roublard de Péricourt a tout prévu pour protéger sa fille si cela tournait mal. Madeleine Péricourt n’attend plus rien de cet époux infidèle : elle va devenir mère, élever on enfant.

Quand Madeleine perd son père, elle perd aussi la sécurité. Elle tombe tour à tour dans tous les pièges tendus par les vautours qui l’entourent. Elle connait la ruine, le déclassement, l’humiliation. Mais elle va rebondir. Lentement, méthodiquement, elle va ourdir un plan, une machination digne des plus grands espions de l’Histoire pour faire tomber un à un tous les gens qui lui ont fait du mal.

Il ne s’agit pas d’un livre d’Histoire, ni d’un thriller, ni d’une saga familiale, mais c’est tout à la fois. On flirte avec tous les genres avec délice, avec délectation même. Cette suite d’« Au-revoir là-haut » est un bijou, un diamant brut taillé dans le machiavélisme et l’esprit de vengeance. Le scénario implacable nous tient en haleine, de sorte qu’on ne lâche ce roman graphique qu’une fois qu’on l’a terminé. L’adaptation au cinéma ne fait pas l’ombre d’un doute !

ISBN 97823699815006
164 pages
2020
24€

samedi 21 mars 2020

Le Juke-box du samedi - Je sais pas danser [ Pomme ]



Il se peut que Pomme ne sache pas danser, mais ce qui est certain c’est qu’elle sait au moins chanter. J’aime sa voix chaude et profonde. J’aime ce son un peu rock et un peu folk. J’aime quand elle écrit sur nos doutes, nos fêlures, nos failles, nos failles, nos failles.

A 23 ans, elle chante déjà depuis 4 ans. Même si elle est auteure-compositeure-interprète, elle a coréalisé son album « Les Failles » avec Albin de la Simone. Elle est aussi musicienne et ses instruments de prédilection sont la guitare et l’autoharpe. Pomme vient de remporter une victoire de la musique bien méritée dans la catégorie « album révélation ». La cérémonie a eu lieu le soir de la Saint Valentin. Ça ne vous donne pas envie de croquer la pomme ?

« Je vois mon corps partout
Je le compare surtout
Et tu vas pas me croire
J'ai fait le même cauchemar
Je n'veux pas sortir
Je n'veux pas me découvrir
Des failles, des failles
Des failles, des failles »

Pomme, Je sais pas danser (2019)

mercredi 18 mars 2020

Au revoir là-haut -Pierre Lemaitre & Christian De Metter

Dans les derniers jours de la grande guerre, quelques poilus pèsent leur chance inouïe d’être encore en vie… C’est sans compter sur les ordres idiots d’un supérieur idiot, le capitaine Gravelle, qui va amener deux amis à charger sous le feu de l’ennemi. Entre le ciel noir et la boue des tranchées. Il pleut des obus. Un obus va ensevelir Maillard vivant et un autre va emporter la mâchoire de Péricourt. 

Pour s’en sortir, les deux amis vont se soutenir l’un l’autre, réinventer leur vie, trouver leur place dans ce monde post-apocalyptique. Quand Péricourt cache son visage détruit, ruiné, béant sous des masques baroques, on ne sait pas si on doit rire ou pleurer, on navigue entre onirisme et triste réalité. Une fois démobilisés, tous se lancent dans les affaires. Dans le chaos, chacun y va de son escroquerie sur le dos des morts pour la France ! Où les mènera leur sens particulier du patriotisme ? Vous le saurez en vous plongeant dans ce beau roman graphique adapté du roman de Pierre Lemaitre, étonnant, différent, marquant.

ISBN 978236981192
176 pages
2015
22,50€
 

samedi 14 mars 2020

Le Juke-box du samedi - Ton Héritage [ Benjamin Biolay ]



Cette chanson me fait penser à l’héritage que tu ne laisseras pas à tes enfants. Si tu aimais compter les hirondelles sur le fil électrique, écouter les coucous chanter au fond du pré, et courir la campagne jusqu’à la nuit tombée ; si tu aimais l’odeur de la pluie en été, si t’aimais voir les feuilles rougeoyer en automne, et sortir les marrons de leur bogue, étonnés, si tu aimais l’odeur d’humus dans la forêt ; si tu aimais marcher sur les flaques d’eau gelée, si tu aimais glisser sur les pentes enneigées, si tu aimais pisser sur la neige en hiver. Si tu aimais cela, oui si t’aimais tout cela, je crains fort que demain tu ne puisses laisser, léguer à tes enfants que des débris, des cendres et puis du vent. Et pour tout testament, tu laisseras un papier blanc. Je crains fort que l’héritage que tu laisseras à tous tes descendants ne soit pas très reluisant. Alors, en attendant la fin, la fin du monde enfin, écoute cette chanson : 

"Si tu aimes les soirs de pluie
Mon enfant, mon enfant
Les ruelles de l'Italie
Et les pas des passants
L'éternelle litanie
Des feuilles mortes dans le vent
Qui poussent un dernier cri
Crie, mon enfant"

Benjamin Biolay, Ton Héritage (2009)
 

lundi 9 mars 2020

Alma a adoré - Psychose en héritage - Sébastien Rongier


"En choisissant Anthony Perkins, Alfred Hitchcock amplifie l'identité paradoxale de Norman Bates envisagé des sa nomination par Robert Bloch. En effet, Norman, c'est " nor man" c'est quelqu'un qui n'est ni un homme ni une femme "neither woman nor man", sous la domination d'une femme, sa mère, Norma qui n'est pas véritablement une mère non plus "nor Ma". L'identité de Norman est autant un piège par lequel il attire ses victimes, que l'appât (a bait en anglais signifiant "appât", or de bait à Bates, il n'y a évidemment qu'un pas)."

Existe-t-il film plus iconique que Psychose d’Hitchcock ? Autant d’éléments d’un film devenus de véritables emblèmes de la pop culture ? 

Hitchcock est sans doute un des réalisateurs les plus universellement connus. La scène de la douche est devenue culte, même chose pour la musique angoissante de Bernard Herrmann. Le manoir des Bates inspiré par un tableau d’Edward Hopper est lui aussi connu de tous, véritablement emblème gothique de la maison de l’horreur maintes et maintes fois copiée, jamais égalée.

La notion d’héritage citée dans le sous-titre prend vraiment tout son sens au fil de la lecture. En effet, au-delà de l’analyse du film lui-même, c’est aussi son impact culturel au fil des soixante années écoulées. Par exemple, son influence sur des réalisateurs tels que Brian de Palma, Coppola ou David Fincher. Je me souviens encore mon premier visionnage, il y a des années, de certains films de De Palma comme Body Double et la parenté qui m’avait sauté aux yeux, même parenté que j’ai retrouvée il y a un ou deux ans à peine en découvrant Obsession.

Il évoque évidemment le remake plan par plan de Gus van Sant. Ce qui m’a le plus chagriné dans cette version étant de ne pas y retrouver le fameux manoir Bates d’origine, sans doute l’élément le plus symbolique du film à mes yeux.

Les suites faites à l’original sont également traitées, suites dont une est même réalisée par Anthony Perkins lui-même (se détache-t-on jamais d’un tel rôle ?), de même que la série Bates Motel. Enfin j’ai beaucoup aimé découvrir les différences avec le roman de Robert Bloch dont le film s’inspire et les suites imaginées par le romancier qu’il faut absolument que je lise très vite.

Comme vous pouvez le constater, une lecture aussi réjouissante que passionnante qui m’a encore appris beaucoup sur l’impact de ce réalisateur que j’aime tant. Pour finir, je vous laisse découvrir le lien étonnant entre Psychose et la ville de Perpignan…

Dans Alma a adoré – Psychose en héritage, Sébastien Rongier nous livre un essai captivant sur un film devenu phénomène, une publication Marest Éditeur évidemment !


 
Merci à Babelio et Marest Éditeur !


ISBN 979 10 96535 24 8
176 pages
2019
19,00€
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